Moins de deux ans après sa création, la Société protectrice contre la cruauté animale (SPCA) d’Argenteuil a annoncé cesser ses activités le 17 juin dernier en raison de problèmes financiers. Cette décision fait suite à la résiliation d’un contrat que Brownsburg-Chatham avait signé avec l’organisme, privant ainsi la SPCA d’un revenu stable. Le président de l’organisme ne mâche pas ses mots en blâmant directement certains élus de la municipalité qui, de son côté, indique que plusieurs manquements avaient été observés pour expliquer la fin de ce contrat.
Créée en novembre 2019, la SPCA d’Argenteuil prévoyait devenir un refuge sans euthanasie et faire de l’éducation populaire pour faire diminuer les abandons, selon ce que nous avait expliqué en décembre 2019 l’une des fondatrices de l’organisme qui, depuis, n’est plus impliquée dans celui-ci. Or, aucune subvention n’existe pour une telle organisation qui doit souvent faire appel à la générosité du public pour boucler son budget.
Cependant, plusieurs organismes semblables à la SPCA Argenteuil obtiennent aussi des contrats de contrôle animalier auprès de municipalités pour s’assurer de revenus stables. En début d’année, la municipalité de Brownsburg-Chatham avait signé un contrat avec la SPCA Argenteuil pour assurer le contrôle animalier sur son territoire.
Or, lors d’une séance extraordinaire du conseil municipal le 15 juin dernier, il a été décidé de résilier ce contrat sans préavis, en conformité avec certaines clauses du document aux dires de la municipalité.
«C’est dû à plusieurs manquements au niveau du contrat, indique le directeur général de la municipalité, Jean-François Brunet, pour expliquer cette résiliation sans toutefois préciser quels étaient ces manquements. Il y a aussi quelques interventions qui ont été faites par quelqu’un à la SPCA qui ont mené à des plaintes concernant ses agissements et son comportement.»
Le même soir que la résiliation du contrat avec la SPCA, Brownsburg-Chatham a redonné le mandat de contrôle animalier sur son territoire à Patrouille canine Alexandre Roy, qui avait déjà eu ce mandat auparavant.
Manque d’argent
Le président et fondateur de la SPCA Argenteuil, Hugo Blanchette, confirme que ce sont des problèmes financiers qui ont mené à sa fermeture, soulignant au passage que l’organisme avait des frais fixes de 35 000$ par an. La résiliation du contrat avec Brownsburg-Chatham a ainsi mis fin à des revenus stables et l’octroi des prochains contrats dans d’autres municipalités n’aura lieu qu’à la fin de l’année, trop tard pour permettre à l’organisme d’espérer trouver de nouveaux revenus.
Monsieur Blanchette indique que la population a aussi été frileuse à faire des dons monétaires à son organisme alors que seulement 1500$ ont pu être amassés ainsi, bien qu’il concède avoir aussi reçu plusieurs équipements gratuitement. Il affirme avoir englouti près de 30 000$ de ses poches dans ce projet.
«Le projet était majoritairement financé par moi et ma conjointe, dit-il. On va arrêter de perdre de l’argent et mettre la clé sous la porte.»
Par représailles?
Cependant, monsieur Blanchette ne mâche pas ses mots: il affirme carrément que le conseil municipal lui a retiré le contrat de contrôle animalier afin de se venger pour avoir porté plainte à la Commission municipale du Québec contre un élu que monsieur Blanchette accuse d’avoir volé des documents appartenant à l’organisme. Il n’a pas été possible d’obtenir confirmation de cette information auprès de la CMQ au moment d’écrire ces lignes; nous tairons donc le nom de l’élu visé par monsieur Blanchette.
«On a une ville qui a tout fait pour nous faire fermer les portes: elle nous doit de l’argent, elle retient de l’argent et nous a retiré le contrat pour être sûr que l’on ne soit pas capable de payer nos frais du mois de juillet, lance-t-il. Ce sont des représailles politiques. Si on n’a pas un minimum de 5000$ qui entrent par mois, on ne peut même pas offrir les soins de base.»
Selon lui, les manquements reprochés par la ville à son organisme sont basés sur de fausses prémisses, comme de ne pas avoir prévenu la municipalité lors d’une intervention tel que demandé par celle-ci, ce que monsieur Blanchette juge illégal. Il affirme également que la municipalité, qui a un siège au conseil d’administration de l’organisme, n’a peu ou pas joué son rôle d’administrateur.
Hugo Blanchette accuse également le maire suppléant de la municipalité, Kevin Maurice, d’avoir fait de l’ingérence: la SPCA serait intervenue chez la tante de monsieur Maurice concernant des chiens mais aux dires du président, la municipalité lui aurait demandé de ne pas y retourner.
Kevin Maurice confirme l’intervention de la SPCA chez sa tante, avec qui il affirme ne pas avoir eu de contact depuis près d’un an avant cet épisode, mais explique également pourquoi la municipalité a demandé à l’organisme de ne plus y retourner. «Monsieur Blanchette aurait été agressif et intimidant [lors de l’intervention], explique monsieur Maurice en ajoutant n’être jamais intervenu dans ce dossier. Ce n’était pas la première plainte du genre que la ville recevait concernant celui-ci. Il se serait également présenté comme un représentant officiel du ministère de l’Agriculture du Québec, chose qui est fausse. Ça explique pourquoi il n’a pas pu revenir intervenir et que ce sont plutôt les employés municipaux qui sont intervenus.»
Pas de gaieté de cœur
Aux dires du maire suppléant, ce n’est pas gaieté de cœur que le conseil municipal a retiré son contrat à la SPCA Argenteuil qui, à ses débuts, était perçue par celui-ci comme une bénédiction pour la région.
«On voyait qu’avec la SPCA Argenteuil, pour le même montant, on pouvait offrir plus à nos citoyens, affirme monsieur Maurice. Malheureusement, ce n’est pas ce qui s’est passé et ce n’est pas par mauvaise volonté du conseil. Mais actuellement, l’administration de la SPCA, ce n’est pas ce qui est des plus favorables pour un bon développement.»
Selon le maire suppléant, sur 14 dossiers où la SPCA Argenteuil seraient intervenue à Brownsburg-Chatham, huit ont généré des plaintes auprès de la ville contre l’organisme de la part des citoyens impliqués. Il ajoute qu’en seulement dix mois, il y aurait eu une dizaine de changements au sein de son conseil d’administration.
«Une SPCA peut encore voir le jour à Brownsburg-Chatham. On ne mettra pas de bâtons dans les roues, on va même aider, lance Kevin Maurice. Mais ce que le conseil municipal voulait offrir comme service n’est pas celui que monsieur Blanchette offrait.»
Il ne resterait que quelques chats hébergés dans les locaux de la SPCA Argenteuil dont certains ne seront prêts à l’adoption qu’en août prochain. Visitez la page Facebook de l’organisme pour plus de détails.