Le 6 décembre dernier, le Carrefour des femmes de Lachute a tenu une rencontre ayant un double objectif: souligner le 34e anniversaire de la tuerie de la Polytechnique mais aussi de sensibiliser les femmes à dénoncer toute forme de violence misogyne dont elles pourraient faire l’objet ou en être témoin. Une vingtaine de participantes ont pris part à la discussion qui a donné lieu à des moments hautement émotifs pour certaines d’entre elles.
Le 6 décembre 1989, un homme a pénétré à l’École Polytechnique de Montréal dans le but avoué de «combattre le féminisme»: il abattra de sang froid 14 étudiantes en ingénierie et en blessera neuf autres ainsi que quatre hommes avant de s’enlever la vie. Chaque année, le triste anniversaire de cette tuerie misogyne est souligné au Québec.
C’est dans ce contexte que le Carrefour des femmes de Lachute a organisé cette rencontre le 6 décembre dernier. Les noms des 14 étudiantes avec leur photo avaient été étalés sur une table avec une bougie, en compagnie de ceux de trois femmes victimes de féminicide dans Argenteuil: Manon Trottier (1990), Aylin Otano-Garcia (2000) et Océane Boyer (2020).
Cet événement était le point culminant des 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes qui se sont tenus à travers la province. Sous le thème Précarité genrée, violence ignorée, ces 12 jours visaient notamment à mettre les projecteurs sur la violence économique que peuvent subir les femmes.
«La précarité et la pauvreté sont des formes de violence extrême qui sont trop peu souvent reconnues et dénoncées, indique Martine Mantha, une des coordonnatrices des actions collectives et de la visibilité du Carrefour des femmes de Lachute. Nous n’accepterons plus que les femmes soient moins bien rémunérées; nous n’accepterons plus que l’accès aux services éducatifs à l’enfance soit difficile et que les mères monoparentales s’appauvrissent; nous n’accepterons plus que les victimes de violence conjugale ne puissent sortir de leur relation violente par manque de moyens financiers… La violence économique ratisse large mais c’est celle que l’on connaît le moins.»
Le rôle des centres de femmes
Le Carrefour des femmes de Lachute est l’un des nombreux centres de femmes à travers le Québec. L’organisme vise notamment à briser l’isolement des femmes, leur apporter écoute et support dans diverses situations et à sensibiliser la population à certaines problématiques que vivent les femmes dans la société. Il ne s’agit pas d’un centre d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale: ce rôle est joué à Lachute par La Citad’Elle.
«Quand on pense à violence conjugale, on va penser automatiquement à La Citad’Elle car au Carrefour des femmes, on n’est pas associé à une problématique précise, indique Vanessa Massie, coordonnatrice de la visibilité. On travaille avec tous les types de violence et tous les types d’intervention. On est là en complémentarité avec les ressources qui sont plus spécialisées.»
Selon elle, le Carrefour des femmes est un lieu qui peut être fréquenté avant, pendant et après le processus mené par une femme pour se sortir d’un cycle de violence.
Devoir de mémoire
Comme chaque année le 6 décembre, le Carrefour des femmes de Lachute a tenu une minute de silence en mémoire des victimes de la tuerie de Polytechnique et pour trois jeunes femmes décédées dans des circonstances violentes dans Argenteuil. Ce moment est toujours empreint d’émotions pour l’assistance.
«Il est important pour nous depuis des années de se souvenir de ce qui s’est passé en 1989, mentionne madame Mantha. On se doit comme communauté de se souvenir de ces jeunes femmes. Depuis l’an dernier, l’ensemble des maires d’Argenteuil portent le ruban blanc lors de leur séance du conseil de la MRC. Il y a un pas qui a été fait collectivement contre la violence et pour ce qui peut être fait pour la condition féminine dans la région.»
D’ailleurs, le mouvement du ruban blanc pour dénoncer la violence faite aux femmes est né de l’Association féministe d’éducation et d’action sociale (Aféas) de St-Jérôme. L’Aféas de Lachute, qui était représentée par Lise Monette lors de l’événement du 6 décembre, en a profité pour présenter l’Arbre de paix, une banderole faite en 2005 et qui se prêtait bien aux circonstances entourant la cérémonie tenue au Carrefour des femmes.
Pour plus d’informations sur les services offerts par le Carrefour des femmes, visitez le www.cafela.org.