Le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques a émis une ordonnance contre l’entreprise Immeubles Deux-Montagnes afin que cette dernière remette en état un terrain situé à St-André-d’Argenteuil qui a été remblayé avec des matériaux provenant notamment de la démolition d’un immeuble à Montréal. L’ordonnance demande à ce que l’entreprise fasse une caractérisation des sols du terrain d’ici soixante jours.
En janvier 2019, La Presse avait publié un article concernant des déversements de matériaux contaminés en pleine nature. À l’automne précédent, les journalistes avaient suivi un camion transportant des sols excavés provenant d’un chantier montréalais où un bâtiment quasi-centenaire était démoli pour faire place à des condos. Ce camion avait déversé son chargement sur le terrain appartenant à Immeubles Deux-Montagnes, situé à l’intersection de la route 344 et de la rue Latour à St-André-d’Argenteuil. D’autres monticules présents sur le site laissaient supposer que ce n’était pas le premier voyage du genre à avoir été effectué à cet endroit.
Mis au fait de cette situation, le ministère de l’Environnement a envoyé des inspecteurs sur le site en novembre 2018 pour prendre des échantillons de sol. «Les résultats d’analyse de ces échantillons démontrent que les sols de l’échantillon dans le remblai sont contaminés au-delà du critère C en mercure. Ils contiennent également une contamination entre les critères A et B en métaux (arsenic, plomb et étain) et pour plusieurs hydrocarbures aromatiques polycycliques», peut-on lire dans l’ordonnance émise le 3 mai dernier.
D’autres échantillons du remblai ont été prélevés en juillet 2019 et ceux-ci démontraient aussi une contamination dans la plage A-B, soit le plus bas niveau selon l’échelle de la Loi sur la qualité de l’environnement. Il ne serait pas interdit de construire un immeuble sur ce type de sol mais il serait interdit d’en déverser sur un site propre (classé A). Trois des sept échantillons pris dans le sol d’origine «présentent une contamination dans la plage A-B en métaux (arsenic ou zinc)», toujours selon l’ordonnace, ce qui signifie que le sol propre a été contaminé suite à ces déversements.
Entre les deux visites des inspecteurs, d’autres voyages de remblai ont été effectués qui contenaient notamment des matières résiduelles, comme du béton, des armatures, de la brique et de l’asphalte. «La superficie du remblai est estimée à 900 mètres carrés (m2) et son volume à 2 700 mètres cubes (m3)», selon l’ordonnance.
En conséquence, le ministère de l’Environnement et de la Lutte aux changements climatiques ordonne à Immeubles Deux-Montagnes de remettre le terrain en état. L’entreprise doit d’abord présenter pour approbation un devis de caractérisation du terrain d’ici 45 jours avant d’avoir 60 jours pour faire cette caractérisation. Le retrait des matières contaminées ne pourra se faire qu’après cette caractérisation.
Un porte-parole du ministère de l’Environnement, Frédéric Fournier, a indiqué par courriel au Régional que celui-ci n’écartait aucun recours pour assurer le retour du terrain à son état original, notamment en cas de non-respect de l’ordonnance, sans toutefois préciser quels seraient ces recours.
Immeubles Deux-Montagnes a son adresse à St-Jérôme et est la propriété d’un certain Marc Latour, selon le Registraire des entreprises. Il a été impossible de retracer monsieur Latour pour avoir un commentaire.
La municipalité en attente de résultats
Le maire de St-André-d’Argenteuil, Marc-Olivier Labelle, a admis être heureux de la décision du ministère de l’Environnement mais admet faire preuve d’un optimisme prudent quant à savoir si le propriétaire du terrain va se conformer à l’ordonnance.
«C’est un dossier que l’on suit depuis longtemps. C’est une bonne nouvelle en soi mais on ne va être pleinement satisfait qu’une fois le terrain remis en état, a-t-il dit. On veut que ces terres soient disposées de façon légale.»
Au lendemain de la publication du reportage de La Presse en janvier 2019, la municipalité avait demandé, de concert avec la MRC d’Argenteuil, plus d’autorité pour pouvoir agir dans ce type de dossier. Depuis, monsieur Labelle indique qu’il n’y a pas eu d’évolution en terme de législation.
«Ce qui a évolué, c’est que l’on a un meilleur retour de la part du ministère de l’Environnement, convient-il. Mais ça reste lourd où en tant que municipalité, on doit faire les constats mais les suivis sont longs, lents et coûteux. Il faut que les villes aient plus de dents et que le ministère soit plus incisif dans ses interventions, autant dans les délais que dans l’émission de constats.»