le Samedi 19 avril 2025
le Vendredi 29 septembre 2023 9:00 Municipal

Les villes demandent plus d’outils pour se financer

Le maire de Lachute a publié une lettre ouverte en ce sens.
Les villes demandent plus d’outils pour se financer
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Des villes membres de la Fédération canadienne des municipalités (FCM) demandent aux différents paliers de gouvernement de leur donner plus d’outils pour pouvoir se financer afin de mieux répondre aux besoins actuels en matière d’infrastructures. Le maire de Lachute, Bernard Bigras-Denis, a d’ailleurs publié une lettre ouverte en ce sens le 8 août dernier.

Membre du conseil d’administration de la FCM et du comité sur les infrastructures, Bernard Bigras-Denis  confirme que sa lettre ouverte fait partie d’une campagne de visibilité nationale de la FCM afin de sensibiliser le public à cette problématique. «Responsables de plus de 60% des infrastructures publiques, les gouvernements municipaux se retrouvent aujourd’hui poussés à la limite de leurs capacités en récoltant que 10% de l’assiette fiscale. Alors, comment pouvons-nous nous assurer que nos collectivités seront prêtes à soutenir une croissance et à garantir à tous une meilleure qualité de vie?», peut-on lire dans le document envoyé aux différents médias de la région.

Joint par Le Régional, le maire Bigras-Denis précise sa pensée. Il affirme qu’il y a 60 ans, les municipalités récoltaient environ 16,7% de l’assiette fiscale (toutes les sommes récoltées par les différents paliers de gouvernement). Aujourd’hui, cette proportion a chuté à envrion 8 à 10% seulement.

«Pendant ce temps, on a une croissance des coûts: on a des infrastructures qui vieillissent et qu’il faut continuer à entretenir, mentionne le maire. Ça devient difficile pour nous d’investir dans les infrastructures qui sont partagées tant par les municipalités que les institutions gouvernementales, comme les écoles et les hôpitaux.»

Pire, il rappelle qu’au cours des dernières années, les gouvernements ont demandé aux municipalités de devenir plus résilientes face aux changements climatiques, par exemple en construisant des égouts pluviaux plus grands, ce qui ne peut se faire à peu de frais.

«Cette année, on met trois millions de dollars dans nos infrastructures mais si je regarde tout ce qui est demandé par nos ingénieurs, il faudrait que j’en mette dix. On n’est pas capable de mettre une telle somme chaque année», dit le maire de Lachute qui demande, avec ses collègues de la FCM, de revoir le partage des revenus de l’assiette fiscale pour qu’il soit plus approprié à la réalité d’aujourd’hui.

Mieux taxer les gouvernements

Une des façons suggérées par la FCM d’augmenter les revenus des municipalités serait de taxer convenablement… les gouvernements! Actuellement, les immeubles gouvernementaux (écoles, hôpitaux…) ne paient pas directement de taxes municipales: à la place, les gouvernements versent aux villes des «Compensations tenant lieu de taxes» qui ne représentent qu’un certain pourcentage (environ 85%) du taux de taxation résidentielle de chaque municipalité.

«Au niveau de la Fédération québécoise des municipalités (FQM) et de l’Union des municipalités du Québec (UMQ), on demande que ce pourcentage passe à 100% du taux de taxation de base, explique monsieur Bigras-Denis. Pour ma part, à l’UMQ, j’ai demandé que le taux de compensation soit basé sur le taux de taxation commerciale des villes car ces institutions engendrent des dépenses que je n’aurais pas eu si ça avait été des maisons. Par exemple, pour une école, il faut que j’engage trois brigadières, ce que je n’aurais pas eu à faire si ce terrain avait eu des maisons.»

Du côté du gouvernement fédéral, ce dernier verse aux provinces des fonds provenant de la taxe sur l’essence qui, à leur tour, reversent ces sommes aux municipalités pour des projets d’infrastructures tout en ajoutant une contribution. Au Québec, il s’agit du Programme de la taxe sur l’essence et de la contribution du Québec (TECQ). Monsieur Bigras-Denis indique que la FCM aimerait que la contribution fédérale soit doublée, à 4,4 milliards de dollars.

«Ça donnerait une meilleure répartition à travers le Canada et ça nous permettrait de mettre plus d’argent dans nos routes et infrastructures», dit-il.

Selon lui, Ottawa et Québec se seraient montrés ouverts à faire quelques changements, citant en exemple un montant de 700 000$ que devrait recevoir Lachute l’an prochain en provenance de la TVQ, tout en étant peu réceptif sur le sujet de la TECQ.

«Je crois comprendre que le fédéral s’en vient avec des subventions pour aider les municipalités à faire face aux changements climatiques mais ça ne serait pas assez, déclare-t-il. Au niveau provincial, le premier ministre a dit qu’il ne voulait pas compenser davantage les municipalités, ce qui est triste à entendre. On peut pas toujours se tourner à taxer notre population.»

Bernard Bigras-Denis indique que des représentations seront faites au cours des prochains mois auprès de représentants fédéraux par la FCM sur ce dossier de l’assiette fiscale. Autrement, il souhaite que la population soit sensibilisée à cette problématique pour qu’à son tour elle puisse mettre de la pression sur les autres paliers gouvernementaux.

«Il faut que tout le monde puisse comprendre que les municipalités ne peuvent pas y arriver seules car sinon, il faut qu’on se retourne pour puiser dans leurs poches. On peut changer le pacte fiscal qui nous oblige actuellement à aller chercher 79% de nos revenus dans les poches des citoyens. Il faut simplement être novateurs», conclut-il.