La Journée internationale des droits des femmes a été célébrée un peu partout dans le monde, le 8 mars dernier. Localement, au River Rock Inn de Rockland, la Maison Interlude House (MIH) a profité de cette journée spéciale pour célébrer un anniversaire qui l’est tout autant, soit ses 40 ans d’existence.
« Je n’étais pas là à l’époque, mais bien des choses ont changé avec le temps, c’est clair », affirme sans équivoque Marie-Pierre D’Anjou, responsable des communications et du développement communautaire à la MIH.
Au départ, l’organisme était uniquement une maison d’hébergement pour femmes victimes de violence conjugale. Maintenant, il s’adresse aux femmes victimes de violence de tous genres et ses services vont bien au-delà de l’hébergement.
« On a des ‘bureaux satellites’ partout dans la région où des gens ont littéralement pour travail d’aider ces femmes. Cela peut être pour se trouver un logement, un emploi, les accompagner en cour, les aider à faire leur budget ou le changement d’école de leurs enfants […], énumère-t-elle.
Festivités et formations
La journée du 8 mars se voulait festive, mais pour la première partie de la journée, elle fut d’abord éducative. La sexologue et psychothérapeute Julie Fournier a ouvert le bal en donnant une formation abordant le traumatisme vicariant. Un enjeu que l’Ordre des psychologues du Québec décrit comme une « fatigue de compassion », pouvant mener la personne à l’écoute d’une victime à développer les mêmes craintes que cette dernière. Près d’une cinquantaine d’intervenantes de divers organismes de la région étaient sur place pour en apprendre davantage sur cette problématique.
Plus tard en après-midi, ce fut au tour de l’auteure Geneviève Rioux à prendre la parole pour justement témoigner de sa propre histoire en tant que survivante d’un féminicide.
« Par la suite, on est tombé davantage en mode ‘5 à 7’, en rendant hommage aux pionnières de la MIH, des femmes courageuses et dévouées qui nous ont permises d’être où on est aujourd’hui », acclame Marie-Pierre D’Anjou, en citant Cindy Assaly, Louise Myner et Renée Bertrand parmi les précurseuses de l’organisme fondé en 1983.
« Femmes et filles remarquables »
En plus de souligner le passé, la MIH a aussi applaudi le présent en remettant dix prix de « Femmes et filles remarquables » à dix femmes et filles grandement impliquées dans leur communauté. Les lauréates étaient : Samme Putzel, Lucie Charlebois, Andréanne Gougeon, Carole Chartrand, Carol-Ann Allen, Johanne Ménard, Geneviève Thomas, Véronic Doré, Maliyamu Matola, ainsi que Marie-Noëlle Lanthier.
Cette dernière est la présidente de l’organisme Leadership féminin Prescott-Russell (LFPR), elle était d’ailleurs très humble par rapport à la réception de son prix.
« C’est un honneur d’être reconnue, surtout par les femmes de notre milieu. Cela étant dit, plusieurs femmes œuvrent au LFPR et je crois que n’importe laquelle d’entre elles aurait aussi pu être à l’honneur », a-t-elle témoigné.
En quête d’égalité
Marie-Noëlle Lanthier a ensuite profité de la tribune qu’apporte la Journée pour rappeler la mission de son organisme.
« Nous, notre mandat est de promouvoir le leadership féminin comme véhicule pour réduire l’écart entre les hommes et les femmes dans les relations de pouvoir […], que ce soit en politique ou dans n’importe quelle table décisionnelle », a-t-elle récité, en mettant l’emphase sur le point suivant.
« Ce n’est pas juste l’affaire de créer une société meilleure pour les femmes, c’est de créer une société meilleure pour tout le monde », souligne-t-elle, appelant tout le monde à s’unir pour ainsi « mieux avancer ».
Des enjeux d’aujourd’hui
Bien qu’elle admet que le mouvement de l’égalité homme-femme a progressé dans les dernières années, la présidente du LFPR poursuit en insistant sur le fait que la lutte est bien loin d’être terminée. Plus encore, que le progrès réalisé récemment ne doit pas être tenu pour acquis : « On le voit juste en regardant ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aux États-Unis par exemple, où les femmes se sont fait retirer leur droit à [l’avortement] », cite-t-elle.
Du côté de la Maison Interlude House, même après 40 ans, on doit encore se battre pour obtenir ses revendications. Le combat actuel est celui d’obtention de financement pour construire un immeuble de 24 logements pour femmes victimes de violence conjugale. Pour l’heure, malgré le soutien municipal de la Ville de Hawkesbury et celui du fédéral du député Francis Drouin, la Société canadienne d’hypothèque et de logement refuse d’embarquer.
« On a déjà le terrain, alors c’est d’aller chercher le plus de soutien possible pour pouvoir construire notre ‘deuxième maison’ d’ici cinq ans, avec ou sans eux », commente sa responsable des communications et du développement communautaire.
Un combat du quotidien
C’est sous les airs d’un spectacle de Laurence Jalbert, devant près de 300 personnes, que la soirée s’est conclue. La mentalité de la MIH étant la même que celle du LFPR, même après 40 ans, le travail accompli ne peut être tenu pour acquis. Ainsi, dès la tombée de rideaux des célébrations, le retour au boulot du lendemain matin était déjà à l’horizon.
« C’est une journée spéciale et pour notre 40e anniversaire, on voulait organiser une grande journée pour le souligner. Mais, on aide plus de 500 femmes chaque année, alors on ne peut pas trop se permettre de prendre trop de day off », achève à la blague Marie-Pierre D’Anjou, croyant elle aussi que le combat pour les droits des femmes doit autant se faire le 8 mars que lors des 364 autres jours de l’année.